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Êtes-vous influençable ou peureux ?

Dernière mise à jour : 4 nov.


Source : La Presse

Auteur : Marie-Eve Fournier

 

On n’a pas vu de vedette québécoise vanter publiquement les mérites d’une cryptomonnaie, comme l’ont fait le quart-arrière Tom Brady, Paris Hilton, Reese Witherspoon et Matt Damon aux États-Unis. Mais nous ne sommes pas à l’abri des influenceurs financiers qui pullulent sur les réseaux sociaux. D’ailleurs, bien des jeunes se font prendre dans toutes sortes de combines, au grand dam de leurs parents qui vont jusqu’à appeler l’Autorité des marchés financiers (AMF) en désespoir de cause.


Près de trois parents sur cinq (58 %) s’inquiètent souvent pour l’avenir financier de leur enfant, selon un récent sondage de la Banque TD. Ils devraient aussi être préoccupés par les vidéos qu’ils regardent en ligne, que ce soit sur TikTok, YouTube ou Instagram.

« Vous n’êtes pas familier avec le secteur financier ? Je peux vous aider ! »


L’offre est attrayante pour ceux qui souhaitent s’enrichir sans trop s’y connaître en matière d’investissement. Mais attention, il se pourrait que l’aventure se termine rapidement par une perte sèche.


« On a souvent des parents qui nous appellent. Leur jeune pleure parce qu’il a perdu 500 $ et qu’il a donné ses informations personnelles », m’a raconté le porte-parole de l’AMF, Sylvain Thivierge. Évidemment, les sommes volatilisées sont irrécupérables. Les plateformes sont à l’étranger. Impossible de retracer qui se cache derrière. Très sophistiqués, ces sites semblent légitimes et professionnels.


Les fraudes peuvent prendre différentes formes, mais les cryptomonnaies sont assurément la saveur du mois depuis deux ou trois ans.


De fait, les plaintes concernant les cryptomonnaies ont bondi de 1056 %, à l’AMF, de 2020 à 2022. Les données pour 2023 ne sont pas disponibles, mais on recense encore plus d’appels, soit 10 à 15 par semaine.



Le phénomène est assurément plus répandu qu’il n’y paraît. En matière de fraudes financières liées à des investissements, les plaintes ne sont jamais très nombreuses. Les victimes ont honte de leur propre comportement et savent que l’argent ne sera pas retrouvé.


Un appel à l’AMF n’est toutefois pas une perte de temps. Les témoignages reçus lui permettent de dresser une liste de sites comportant « un risque élevé » qui devrait être consultée avant tout investissement en ligne. Seulement depuis le début de juin, 23 noms s’y sont ajoutés. C’est énorme.


Bien entendu, les influenceurs financiers ne peuvent pas être tenus responsables de la multiplication des sites web frauduleux. Certains sont des professionnels ayant des connaissances solides et une grande crédibilité. D’autres sont des amateurs qui peuvent tout de même prodiguer de très bons conseils. On ne doit pas mettre tout le monde dans le même panier.


Mais certaines personnes aux compétences « souvent très relatives », peuvent « amener des investisseurs à commettre des erreurs coûteuses », met en garde la Chambre de la sécurité financière dans un article récent.


Les risques proviennent notamment des vidéos créées spécifiquement pour attirer les jeunes, axées sur le mode de vie et le plaisir de s’enrichir rapidement sans effort.


« Les gens racontent leur histoire, comment ils ont fait de l’argent, comment ils vivent, etc. Ils misent beaucoup sur le fameux FOMO (fear of missing out, ou la peur de rater une occasion), qui peut devenir aigu quand un influenceur soutient qu’il a investi dans le bitcoin juste avant que sa valeur grimpe de 302 % en 2020. L’investissement s’effectue alors plus par envie ou par mimétisme », relate la Chambre.


Hélas, ce n’est pas toujours évident pour quelqu’un qui commence à s’intéresser au sujet de faire une évaluation juste de la qualité du contenu qu’il regarde.


Et, fait important, le risque se trouve parfois là où on s’y attend le moins : dans les commentaires sous les vidéos. Des internautes y écrivent leurs trucs et leurs suggestions d’investissement. Tout cela semble crédible, mais les recommandations mènent vers des sites frauduleux où divers produits financiers sont proposés, rapporte Sylvain Théberge, de l’AMF.


Au fil des ans, l’internet a permis de démocratiser le monde des finances et de l’investissement, ce qui n’est pas mauvais, au contraire. Et les influenceurs ont contribué à accroître l’intérêt des jeunes pour la gestion de leur argent.


Il n’y a pas de mal à préférer l’auto-investissement et les vidéos ludiques aux rencontres en personne dans une banque. Or, la vigilance est de mise. Les messages de l’AMF à ce sujet passent malheureusement mal. Sur les réseaux sociaux, où elle tente de rejoindre les plus jeunes investisseurs, on l’accuse de vouloir défendre les grandes institutions, de protéger « le système », « les privilégiés » et la « business ». On lui reproche aussi d’être fermée à l’innovation dans un secteur traditionnel et de vouloir faire peur au monde.


Ça doit être l’âge, mais quand je pense aux 30 millions US perdus par Tom Brady avec FTX, je trouve comme l’AMF qu’il faut craindre de perdre ses économies en les transférant sur un site sorti de nulle part.

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